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le poème des arbres


Et, lorsque la tourmente a fondu sur leur tête,
Les arbres ont sur eux tant d’horreur et d’ennui,
Qu’un long frisson d’effroi les trouble jusqu’au faîte,
Et qu’on entend gémir leur plainte, dans la nuit !…

Parfois, c’est le tonnerre et c’est l’éclair des nues
Qui les brise, d’un seul irréparable coup ;
Et l’on voit se dresser, au loin, leurs branches nues,
Comme les bras d’un mort qui resterait debout !…

Souvent aussi le feu dévore leurs ramures,
Meurtrit leur chair vivace, et leur front couronné,
Déchire leur visage, abat leurs chevelures,
Et fait, de tout leur corps, un spectre calciné !…

Et, dans la forêt claire où le jour étincelle,
Tous ces arbres, meurtris à jamais, ont sur eux
Ce signe de beauté presque surnaturelle
Que la souffrance met au front des malheureux !…

V

Pour la fraîcheur si douce de votre ombre,
Pour ces longs ans, dont vous êtes doués,
Pour vos bienfaits, pour vos grâces sans nombre,
Arbres, soyez loués !