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LE DISPARU.

gent à fleur d’eau en faisant un sillon d’une blancheur de neige… Il ne se lassait pas de regarder surtout les gros bateaux européens au tuyau multicolore qui fendent la vague de leur masse énorme, et passent en soufflant comme une monstrueuse bête…

Les teintes superbes du crépuscule commençaient de s’effranger dans le bas du ciel. Les maisons semblaient toucher aux nuages, qui passaient, poussés par le vent comme des voiles… Des parfums maritimes montaient des grèves… Des senteurs de varech et de sel se mêlaient à l’âpre et résineuse odeur des forêts… C’était l’approche de la fin du jour avec sa douce et reposante beauté…

Les barges de pêcheurs, voiles tendues, misaines au vent, quittaient le large. Le « Gros » en surveillait la marche avec intérêt, quand soudain, d’une voix grêle il dit vivement : « M’man, v’là un homme qui vient, un homme que je connais pas ! »… Elle se pencha dans la fenêtre. En effet, un homme mal habillé, mal chaussé, la barbe épaisse, ayant presque l’air