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dans son pays natal ;

Un jour de la fin juillet il fit part de ses projets à Placide.

— Je songe sérieusement à vendre ma ferme, dit-il, voulez-vous en devenir le propriétaire ? Je vous la céderai à un prix raisonnable et avec de bonnes facilités de paiement.

La proposition plaisait à Placide, parce qu’il aimait le pays et qu’il prenait de jour en jour l’habitude de se croire le maître de ce domaine.

Sa femme aussi aurait aimé à se voir, là, chez elle, sur sa propriété.

— Je suis bien disposé à acheter, répondit Placide, à condition que vous ne me demandiez pas un trop gros prix et pas trop de comptant, car je ne suis pas riche, sans parler de la récolte qui ne promet pas merveille.

— Dans notre métier, répliqua le fermier, il faut s’attendre à des récoltes moyennes. La terre en produit de fort bonnes, mais aussi de médiocres, et en général elle apporte de l’argent à celui qui sait la cultiver avec intelligence. Je sais une chose, toutefois : jamais, depuis les trente ans que je suis établi sur cette ferme, je n’ai perdu tout à fait ma récolte. Je peux ajouter que j’en ai eu plus de bonnes que de mauvaises, et cette ferme, avec la richesse inépuisable de son sol, promet encore la fortune à un fermier intelligent. Tenez : je vous vendrai ma ferme, roulant compris, pour 12,000 dollars et ne vous demanderai que 4,000 dollars « cash ».

— Est-ce que vous m’abandonnerez toute la récolte de cette année ?

— Si vous achetez de suite, la récolte est à vous : nous annulerons le bail que nous avons passé.

Il parut à Placide et à sa femme que l’affaire était avantageuse ; seulement, c’était l’argent qu’il fallait payer de suite qui embarrassait, Placide ne pouvait pas disposer de plus de mille dollars sur-le-champ.

— Bah ! dit le fermier, donnez-moi mille dollars de suite et un