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tes ne pèsent pas, étant tout en poil, et je n’eus pas de mal à le hisser sur mon cheval, lequel naturellement s’ébroua fort.

« On peut se figurer le retour triomphal du chasseur et si la fameuse « bête du diable » fut retournée dans tous les sens ! Malheureusement, il ne fallait plus songer à en continuer la chasse, leur fourrure perdant valeur au printemps comme beaucoup d’autres.

« N’importe, mes prises m’avaient rapporté environ 150 dollars (moins dix piastres pour les pièges) cela nous faisait un petit pécule pour l’année qui s’ouvrait ; d’ailleurs nous avions appris à vivre d’économies — la vie primitive, quoi !

« La neige partit au commencement d’avril, et le sol se dégela lentement, mettant en joie les fermiers d’alentours qui préparaient déjà leurs charrues ; mais je ne pouvais les imiter, n’ayant pas de terre « cassée », et d’ailleurs avec les difficultés pour la vente du blé, celà ne me semblait pas en valoir la chandelle ; j’eus l’idée de faire du jardinage.

« Un Norvégien, qui manquait d’argent, consentit pour 10 piastres à me casser deux acres, avec ses deux chevaux auxquels je joignis les deux miens — naturellement, je devais nourrir homme et bêtes — puis pour trois piastres de supplément, il me tritura le tout d’un quadruple disquage.

« Il ne me restait plus qu’à herser et planter ça en « patates », ce que je fis selon les données des Fermes Expérimentales, c’est-à-dire chaque pied très espacé, afin d’aérer le champ et empêcher par là la brume nocturne de séjourner, cause efficiente des gelées précoces. Je mis en terre 15 minots de pommes de terre, soit 10 dollars de dépenses.

« Pour mon malheur, j’ignorais que le jardinage exige un terrain bien propre ; or le mien, cassé trop tôt (fin avril), ne pouvait l’être. Les herbes sauvages que la charrue avait retournées, gardant cependant quelque