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« Il me fallait donc une étable : je décidai de la faire pour une dizaine de têtes, soit 24 pieds sur 20, en bois rond. J’avais déjà quelques logs par terre, j’abattis le reste et me mis en quête d’un aide.

« Ce pays est celui de la solidarité ; elle est sans doute une nécessité pour la réussite d’un chacun. Mais elle semble aussi jaillir spontanément des cœurs. Sans citer à ce sujet les canadiens-français absolument hors de pairs là-dessus, ni même leurs frères en colonisation les Anglo-canadiens, on dirait que les autres peuples tiennent aussi à la faire proclamer une vertu canadienne. Je ne me rappelle pas avoir jamais essuyé un refus toutes les fois que j’ai frappé à la porte d’un voisin pour demander appui, et ceci je dois le dire hautement.

« Le Norvégien, qui habitait alors la terre située au Nord de mon « homestead », était comme tous ceux de son pays, habile dans la charpenterie ; j’allai le trouver et lui proposai de venir me donner un coup de main, lui offrant en paiement mon aide soit pour son battage, soit pour charrier son grain (car déjà j’avais pris comme règle de ne jamais payer en argent mais en travail, aux dépens de ma paresse native). Cela lui agréa et il vint le lendemain.

« Deux jours suffirent pour monter le « chantier » en question, et un troisième pour en bloquer les intervalles, jeter une charge de vieille paille comme toiture et mettre la porte. On va vite à travailler de compagnie, et je trouve très juste cette remarque d’un vieux « settler écossais » : « Deux hommes travaillant ensemble sur la même ferme feront autant d’ouvrage et moins de peines que trois fermiers isolés ! » Il ne me restait plus qu’à bousiller les interstices des murs au premier jour de loisir, et mes bêtes auraient un abri.