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LVII

LE ROI HEO.



Il y avait un orphelin dont le nom de famille était Heo (porc). Il descendit de la forêt pour chercher un asile, et se loua chez un mandarin. Un jour son maître lui dit de lui laver les jambes et de prendre bien garde de lui égratigner trois signes rouges[1] qu’il avait aux jambes. Si cela lui arrivait il ferait périr toute sa famille[2]. Le jeune garçon lui répondit : « Si vous avez trois signes rouges, moi j’en ai neuf ; je vaux bien mieux que vous. » Le maître se prit à réfléchir et se dit : « S’il a neuf signes rouges, il est certainement destiné à devenir roi ; il faut le faire périr. »

Le maître ordonna alors à une servante de préparer du poison pour empoisonner le jeune garçon, mais la servante eut pitié de lui et, tout en faisant semblant de s’adresser à ses porcs, elle cria : « Porc ! Ô porc ! si tu manges tu mourras, si tu ne manges pas tu mourras aussi. »

Le jeune garçon comprit bien que par ces paroles la servante faisait allusion à quelque chose qui le touchait, mais il eut beau la presser elle ne voulait rien dévoiler. Enfin elle lui dit : « Si vous voulez me promettre de me prendre pour femme quand vous serez roi, je vous dirai tout. » Heo le lui promit : « quand je serai roi, dit-il, viens à moi les cheveux tombant sur les épaules pour que je te reconnaisse à ce signe, et je te prendrai pour femme. » Là-dessus il prit la fuite et alla s’engager ailleurs ;

  1. Les devins tirent de ces signes divers présages suivant la position qu’ils occupent sur le corps.
  2. Giét ba ho ; exterminer les trois familles, c’est-à-dire fa famille du père, celle de la mère et celle de la femme.