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LXVI

LE LANGAGE DES ANIMAUX.



Un homme riche allait chaque jour se promener dans le chemin. Une fois il vit deux serpents dans leur trou, la femelle changeait de peau et le mâle allait chercher de la nourriture pour elle. Une autre fois c’était le mâle qui changeait de peau ; mais la femelle, au lieu de rester à le soigner, allait courir avec ses galants. L’homme, indigné de sa conduite, lui tira une flèche et la tua. La flèche resta dans le corps.

Au bout de quelques temps, le mâle ne voyant pas revenir sa femelle rampa hors de son trou. Il la trouva morte avec la flèche au travers du corps. Il reconnut la flèche et résolut de venger la mort de sa femelle sur son meurtrier. Il entra donc dans la maison de l’homme et, caché dans une gouttière, attendit une occasion favorable pour le mordre.

Par bonheur l’homme dit à sa femme : « Les mœurs des animaux me font rire. » Sa femme lui demanda pour quelle raison. « L’autre jour, dit le mari, je passais dans le chemin ; un serpent mâle était dans son trou à changer de peau, pendant ce temps sa femelle montait au bord du trou pour recevoir les galants. Voilà comment sont les animaux et comment sont aussi les hommes. »

Le serpent, couché dans la goutière, entendit ces paroles et vit que l’homme avait puni avec justice sa femelle ; il s’en alla donc sans lui faire de mal et un autre jour vint porter dans son lit sa pierre précieuse en signe de reconnaissance.

Une fois en possession de cette pierre[1], l’homme comprit

  1. Ngoc nghe. La pierre qui permet d’entendre tout ce qui se dit. Les serpents ont dans la bouche une pierre de cette nature ; d’autres animaux, les