Page:Landes - Contes et légendes annamites, 1886.djvu/293

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par conséquent, il devait chercher une école près d’un carré de roseaux et ayant des oignons devant la porte[1].

Muni de ces renseignements, le mari retrouva son acheteur qui lui demanda qui lui avait indiqué sa demeure. L’autre lui répondit que c’était sa temme, et le maître d’école dut reconnaître le génie perspicace de cette femme. Ce jour-là il faisait un sacrifice aux ancêtres. Il invita le niais à boire et à manger. Il lui donna ensuite des gâteaux pour les porter à sa femme, et aussi une branche de jasmin qu’il ficha dans un morceau de bouse de buffle.

La femme comprit à ce message que le maître d’école la raillait d’avoir, malgré son intelligence, épousé un homme stupide. Il est dit en effet :

 
Tiëc con gai khôn lay thàng chông dai.
Tiéc bây hoa lài can bât cut trâu.

Je plains la femme sage épouse d’un sot mari.
Je plains la fleur de jasmin plantée dans la bouse de buffle.

Cette femme se mit à songer à son malheureux sort ; elle devint toute triste et résolut de se jeter à l’eau. Elle alla donc sur le bord du fleuve et s’assit sur la berge, en appelant la mort.

Le maître d’école cependant avait réfléchi aux conséquences de son message et il voulut les prévenir. Il prit une nasse percée[2] et alla pêcher. Arrivé au lieu où la femme se tenait il lui cria : « Allez-vous-en que je prenne du poisson. » La femme voyant un

  1. Ce dernier trait ne constitue pas, à vrai dire, une indication bien précise, car l’on peut voir devant un grand nombre de maisons annamites de petits jardins suspendus qui consistent le plus souvent en oignons plantés dans des caisses supportées sur des pieux.
  2. Do bôi, panier ouvert aux deux bouts qui ne peut servir de nasse.