Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/19

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qu’on a momentanément sacrifiée ? De tels biens seront soumis pendant tout le temps qu’ils dureront à d’incessantes fluctuations : quelle stabilité dans la valeur d’un outillage industriel, dans celle d’un titre de rente ou d’une obligation ? Que si au contraire le capital est ce bien auquel on a renoncé, alors le plus souvent le renoncement aura eu lieu dans un instant déterminé, et le bien sacrifié ne pouvant être considéré que dans cet instant, ne sera susceptible que de recevoir une valeur : le titre de rente a été acquis pour un certain prix, l’outillage de même. Il n’y aura d’exception que pour le cas où le renoncement aura pris la forme particulière d’une consommation différée : le cas de la forêt qu’on laisse croître, du vin qu’on laisse vieillir, celui des provisions qu’on amasse ; alors en effet le renoncement ne se fait point une fois pour toute, il est réitéré en quelque sorte à chaque instant, jusqu’au moment de la consommation. Enfin la conception que je préfère a le mérite de s’attacher à une réalité pratiquement et scientifiquement plus importante que celle à laquelle l’autre conception s’attache. Celui qui songe à se lancer dans une opération capitalistique met en balance deux quantités, ce qu’il doit avancer, comme l’on dit, et ce qu’il retirera de son avance ; c’est la comparaison de ces deux quantités — le temps que les revenus se feront attendre étant, bien entendu, pris en considération — qui décidera de la rentabilité de l’opération ; notre capitaliste n’aura aucun souci, en théorie du moins[1], des biens en lesquels il devra transformer ses avances,

  1. Dans la réalité, il en va autrement. Les prévisions n’étant jamais sûres, le capitaliste préférera, toutes choses égales d’ailleurs, l’opération qui lui laisse la possibilité de retirer à tout instant les avances engagées, de réaliser sans trop de dommage les biens acquis au moyen de ces avances, à l’opération qui une fois commencée doit nécessairement être conduite jusqu’au bout.