Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/362

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que contient le chapitre du livre de Cassel sur les relations entre l’intérêt et la monnaie[1].


13. La troisième partie de l’ouvrage de Cassel[2] démontre la « nécessité » de l’intérêt ; il présente les conclusions pratiques que notre auteur a cru pouvoir tirer de sa théorie.

L’intérêt est nécessaire, dit Cassel : dans un État socialiste il subsisterait, à peu près égal à ce qu’il est dans notre société d’aujourd’hui, sous le régime de la propriété privée. L’État socialiste construirait des maisons : pourrait-il régler le loyer de ces maisons en telle sorte qu’il récupérât seulement la dépense de la construction, abstraction faite du caractère capitalistique de l’opération, de l’attente que cette opération implique ? non pas : il lui faudrait demander davantage à ses locataires, il lui faudrait faire payer cette attente capitalistique.

Tel est, sommairement exposé, le raisonnement de Cassel. Ce raisonnement suppose que dans l’État socialiste le prix des biens serait déterminé par le coût de ces biens estimé en travail. Mais sur la détermination des prix dans le régime socialiste on peut très bien se faire une conception différente[3]. Et alors de l’argumentation de Cassel il ne resterait plus grand chose ; je veux dire que cette formule : « l’intérêt existera nécessairement dans le régime socialiste tout comme dans le régime actuel », cette formule ne présenterait peut-être plus un sens très net. Tout ce qu’il y aurait lieu de retenir de l’argumentation de Cassel, c’est cette idée — juste à coup sûr — que l’État socialiste ne pourrait faire progresser l’économie par accentuation du caractère capitalistique de la production sans que la chose, tout d’abord et en elle-même, lui coûtât[4].

Admettons que dans la société socialiste les biens fussent vendus selon la méthode que paraît concevoir Cassel. Alors l’intérêt devrait exister sans doute. Pour construire une maison qui dorera un certain nombre d’années, il faut 10.000 journées de travail ; le fait de dépenser 10.000 journées de travail pour des

  1. C’est le chap. 5.
  2. Chap. 6 et 7.
  3. Voir mon Utilité sociale de la propriété individuelle, §§ 246 et suiv.
  4. Aux pp. 33-34, Cassel parle du projet élaboré par Proudhon d’une banque d’échange qui aurait fait l’escompte gratuitement. L’idée de l’escompte ou du prêt gratuit est une idée que la science condamne : le prêt gratuit — j’entends le prêt illimité — ne serait possible que si la capitalisation — la capitalisation illimitée — n’était accompagnée d’aucun sacrifice. Or la capitalisation, en elle-même, coûte au capitaliste, que celui-ci soit un individu où qu’il soit un État, c’est-à-dire une collectivité d’individus.