Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/218

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utilités qu’on ne leur fait pas payer. Comment séparer les services publics qui sont productifs, comme on dit, de ceux qui ne le seraient pas ? On établit couramment des démarcations entre ces deux catégories : de telles démarcations sont nécessairement arbitraires. L’instruction que l’État et les communes donnent pour rien à quantité d’enfants a, à coup sûr, des conséquences considérables pour l’économie. Ne faut-il pas, tout aussi bien, une justice, et par conséquent une force publique pour que l’activité économique des individus puisse se déployer ? Quant à ces forces militaires que l’État entretient spécialement pour garantir son indépendance et pour être en mesure de se faire respecter par les États voisins, ne faut-il pas re connaître qu’elles protègent et qu’elles servent les intérêts de la nation ? En définitive, il n’est pas ou presque pas de service public dont le fonctionnement n’intéresse l’économie.

Ce domaine public, ces services publics gratuits dont nous venons de parler représentent ce qu’il y a dans notre société de communisme ; il s’agit ici, au reste, d’un communisme d’une sorte particulière : car la souveraineté de l’État, la puissance des unités administratives inférieures se fondent non pas sur la seule force de la coutume, comme il arrive par exemple dans les communautés primitives, ni non plus exclusivement sur la volonté des membres de la collectivité, comme c’est le cas pour certaines communautés constituées par application de principes raisonnés, mais sur la tradition, le sentiment, l’intérêt et la contrainte à la fois.

À côté, cependant, de ces propriétés collectives dont la jouissance est donnée à tous gratuitement et des services publics gratuits, il y a des services publics dont les personnes morales administratives tirent des revenus. Au reste, elles ne se comportent pas toujours ici comme feraient les particuliers : car elles peuvent être guidées, dans l’exploitation de leurs biens, de leurs services productifs, par d’autres préoccupations que par la préoccupation du gain. Mais d’autres fois — et trop souvent — elles peuvent être assimilées tout à fait aux particuliers. Les personnes morales administratives ont généralement un domaine foncier. En France, sur une étendue de terre cultivée d’environ 44 millions d’hectares, l’État possédait, en 1898, 1.110.708 hectares, les départements 8.243, les communes 2.982.687, cependant que les établissements hospitaliers possédaient 208.100 hectares, diverses catégories de propriétaires 167.909, et les particuliers enfin 39.758.043. Pour ce qui est des forêts, l’État en possédait, en 1897, 1.124.118 hectares, soit environ 11 %, les communes 1.923.538, et les particuliers 6.473.593.

En Prusse, en 1893, 2.256.581 hectares de terres cultivées étaient propriété publique — l’État possédait 394.100 hectares en 1896 —, et 24.002.032 appartenaient aux particuliers. L’État d’autre part avait, en 1896, 2.761.337 hectares de forêts, soit 33,7 % des forêts du pays. Dans