Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/272

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passer en revue les principaux des fadeurs divers qui assurent la supériorité technique et économique soit à la grande exploitation agricole, soit à la petite. Il faut se garder de croire que les dimensions des exploitations se régleront sur ce qui est le plus avantageux. Déjà nous avons vu que dans l’industrie et le commerce la concentration était entravée, dans une certaine mesure, par la division des capitaux. Pour ce qui est de l’agriculture, une autre considération intervient, qui a trait à la façon dont l’agrandissement des exploitations peut se faire.

Quand un manufacturier veut augmenter sa production, s’il dispose d’assez de capitaux, rien ne lui est plus facile : il n’a qu’à élargir son usine — à la rigueur, il peut la transporter en un autre lieu —, à acheter de nouvelles machines, une quantité plus grande de matières premières, à embaucher un plus grand nombre d’ouvriers, etc. Mais supposons un agriculteur qui veut s’agrandir : il lui faudra acquérir des terres, et non pas n’importe quelles terres, mais ces terres qui sont contiguës à la sienne. Or tout le monde sait combien il est difficile d’acheter, du moins à des prix raisonnables, les terres que l’on convoite.

144. L’association comme moyen de défense de la petite exploitation. — Nous avons supposé, jusqu’ici, que le petit cultivateur exploitait sa terre d’une manière tout à fait indépendante. Mais il a la ressource de s’associer avec les autres petits cultivateurs : et par l’association il réussira, dans une certaine mesure tout au moins, à faire disparaître cette inégalité qui pourrait exister, au point de vue des conditions de la production, entre le grand cultivateur et lui.

À vrai dire, il n’est pas inconcevable que les petits industriels, les petits commerçants, eux aussi, pour soutenir la concurrence de la grande production industrielle, du grand commerce, recourent à l’association. Et ils y recourent en effet[1]. Nous ne faisons pas allusion, ici, à ces associations de toutes sortes qui, défendant en diverses manières les intérêts professionnels de leurs membres, n’apportent point à ceux-ci une aide économique directe. Mais il a des sociétés de magasinage — elles étaient au nombre de 94 en Allemagne en 1903 — que de petits producteurs de l’industrie créent pour avoir un magasin commun où ils exposent leurs produits. L’Allemagne comptait encore, vers la même date, 315 associations de petits industriels pour l’achat des matières premières et des instruments. Les banques coopératives allemandes du type Schulze-Delitzsch — une seule fédération en groupait, en 1903, 960, qui faisaient pour plus de trois milliards de prêts — comptent parmi leurs emprunteurs 25 % environ d’artisans indépendants et 10 %, de commerçants ; et

  1. Voir Bourguin, Systèmes socialistes, chap. 14, II, § 11, et Annexe VI, passim, Gide, Économie sociale, chap. 4, II.