Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/353

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Notons que la navigation maritime va se concentrant de plus en plus. Pour la navigation à vapeur, le nombre des tonneaux bruts était de 6, 7 millions en 1880, de 28,3 millions en 1903 ; dans l’intervalle de ces deux dates, le tonnage moyen par entreprise passait de 2.572 tonneaux à 5.171 ; le tonnage des compagnies possédant plus de 100.000 tonneaux passait de 357.163 tonneaux à 7. 849. 590, et arrivait à représenter 27,6 % de l’ensemble au lieu de 5,2 %[1]. Et entre ces grandes entreprises, des coalitions commencent à se nouer, comme ce Trust de l’océan dont il a été beau coup parlé il y a quelques années.

183. La navigation intérieure. — La navigation intérieure[2] utilise tantôt des voies tout à fait naturelles, comme celles que fournissent certains lacs et certaines rivières, tantôt des voies que la main de l’homme a contribué à ouvrir — ainsi quand il s’agit de rivières canalisées —, par fois enfin des voies purement artificielles, à savoir les canaux. Les travaux que l’amélioration ou l’établissement de ces voies ont nécessités ont été exécutés souvent par les États ; en tous cas, elles appartiennent pour la plupart aux États : en France, il n’y a que 392 kilomètres de canaux qui ne soient pas à l’État ; en Allemagne, que 608 ; en Russie, que 240 : et dans ces chiffres sont compris des canaux qui appartiennent à des communes. Le seul canal très important qui soit propriété privée est le canal de Suez, où la navigation s’est élevée, en 1904, à un tonnage net de près de 13,5 millions de tonneaux, pour lequel il a été perçu plus de 115 millions de francs de droits[3]. Mais la navigation du canal de Suez n’est pas une navigation intérieure.

Les voies par lesquelles se fait la navigation intérieure rendent de très grands services aux pays qui en sont pourvus. Les transports par eau coûtent, en effet, beaucoup moins cher que les transports par terre. Les véhicules qui vont sur l’eau peuvent être 4 fois, et même 8 fois plus longs que ceux qui vont sur terre ; leur poids n’atteint que 25 à 33 % du poids du lest, au lieu de 40 à 70 % ; ils ne coûtent à construire que 60 francs environ par tonneau, au lieu de 300 ; enfin tandis que, à une vitesse d’un mètre par seconde, un cheval tire 15 tonnes sur un chemin de fer en palier, il tire 60 à 100 tonnes sur l’eau. Aussi emploie-t-on beaucoup les voies navigables quand il s’agit de transporter certaines matières très lourdes, comme le sable, la chaux, les minerais, les bois, la houille, les engrais, etc.

Voici un tableau donnant la longueur en kilomètres des voies navigables dans les pays qui en ont le plus :

  1. Cf. Bourguin, Systèmes socialistes, Annexe I, 3.
  2. Voir dans le Handwörterbuch les articles Binnenschiffahrt, wirtschaftliche Bedeutung und Statistik, par Kurs (t. II), et Kanäle, par le même (t. V).
  3. Aperçus statistiques, tableau 239.