Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/107

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raison au contraire soit une force agissante, comme elle l’est effectivement, et le devoir sera réintégré dans la morale, le devoir étant l’idéal rationnel en tant qu’il est capable d’influer sur notre conduite.

Toutefois Kant a eu tort de commencer par affirmer le devoir, et par le revêtir de certains caractères, pour ensuite conclure du devoir à la liberté. Kant pose d’abord le devoir : c’est qu’il veut rechercher à quelles conditions une morale est possible, et que la possibilité de la morale ne fait pas de doute pour lui. Mais il faut examiner également si la morale est possible. Et alors, le devoir ayant besoin lui-même d’être critiqué, il ne sera pas licite de déduire la liberté du devoir par le moyen de cette remarque que sans la liberté, le devoir s’évanouit. Il y aura lieu de demander aux faits, et aux faits seuls si nous sommes libres ; après quoi on réglera sa conception du devoir sur ce qu’on aura constaté touchant l’existence ou la non existence, et sur la nature de la liberté. Au vrai, les choses se présenteront ainsi : nous sommes des êtres raisonnables, qui éprouvons, parce que raisonnables, un certain besoin de justifier nos actions à nos propres yeux ; mais la raison ne formule pas seulement des exigences, elle travaille aussi à les satisfaire — c’est là un fait que nous observons — ; et alors, comme conséquence, la notion du devoir surgit, avec la signification qui a été dite plus haut.

C’est aux faits qu’il appartient de nous apprendre si nous sommes libres. J’ajouterai qu’il faut leur poser la question directement, et non pas solliciter d’eux une réponse par un moyen détourné, comme celui auquel recourt M. Fouillée. M. Fouillée a cru pouvoir résoudre le problème de la liberté et démontrer l’existence