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Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/152

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la conscience en un moment donné ne sont pas séparés les uns des autres comme les objets matériels dans l’espace ; c’est que la conscience — à la différence de l’espace, lequel est multiplicité pure — est unité en même temps que multiplicité ; c’est que les états psychologiques se pénètrent les uns les autres, à des degrés d’ailleurs très divers. Cette interpénétration des états psychologiques, au reste, le calcul hédonistique devra en faire abstraction, tout au moins jusqu’à un certain point. Mais en cela il ne méconnaîtra pas, comme M. Bergson l’enseigne, le moi « profond », le moi « réel » ; procédant ainsi pour donner satisfaction aux exigences de la raison, il permettra au contraire de réaliser le moi dans la mesure du possible.

Les théories de M. Bergson écartées, qui tendent à nier toute possibilité d’une mesure des plaisirs, il y a lieu de se demander si parmi les biens que nous pouvons rechercher il n’existe pas, du moins, des catégories incommensurables. La possession de certains biens est pour nous la condition nécessaire de l’acquisition de tels autres biens : ne sera-t-il pas impossible, dès lors, d’établir une comparaison entre ceux-là et ceux-ci ?

Cette question, si on l’approfondit tant soit peu, appelle une réponse négative. Un bien non indispensable A doit-il être acquis par nous pour que nous puissions nous procurer un autre bien de même espèce a ? Tout ce qui en résultera pour le calcul hédonistique, c’est que le bien A pourra figurer seul dans ce calcul, et que le bien a n’y pourra jamais figurer que précédé de A. Il en va pareillement si l’on compare ensemble des biens indispensables et des biens non indispensables. Dans le calcul hédonistique, sans doute, il ne pourra