Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/17

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assez, pour l’établir, de faire appel à un sentiment que tous les hommes connaissent, à un degré plus ou moins fort.

Si tous les hommes, à un degré ou à un autre, connaissent le besoin de devenir maîtres d’eux-mêmes, de contrôler leur conduite, c’est que, pour éprouver ce besoin, il suffit d’être doué de réflexion. Et ceci montre, sans qu’il y ait lieu présentement de préciser davantage, le caractère sérieux du besoin moral. Le besoin moral, la moralité, complètent, achèvent le développement de l’être. Celui-ci commence d’exister, j’entends d’exister pour lui-même, d’être autre chose qu’un objet de connaissance pour d’autres êtres, avec la conscience. Après la conscience vient la réflexion, qui, opposant nettement le moi au non-moi, donne à la conscience tout son prix. Mais la réflexion ne peut pas aller sans que le désir apparaisse, chez l’être qui en est doué, de régler sa conduite ; nous ne saurions, nous détachant en quelque sorte de notre activité spontanée, nous borner à regarder celle-ci se déployer ; il nous faut d’une certaine manière modifier cette activité pour qu’elle devienne pleinement et complètement nôtre.

Qu’on entende bien cette remarque. Elle ne va pas à dire que la vie existe pour la moralité, en d’autres termes, que seule la moralité ait de la valeur, et que la vie considérée en elle-même, non pas comme une condition de l’exercice de la moralité, en soit tout à fait dépourvue. Cette conception, je l’examinerai plus tard, comme celle aussi qui veut que la moralité n’ait de prix qu’autant qu’elle contribue à rendre la vie meilleure[1].

  1. L’opposition de ces deux formules, la moralité pour la vie, la vie