Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/176

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lateur puisse être fondé ; il soutient seulement qu’il a besoin d’être fondé. Et son assertion est juste, par cela même que nous ne sommes pas invinciblement portés à préférer notre plus grand bien, qu’il est nécessaire souvent, pour nous déterminera chercher celui-ci, de faire appel à la raison.

En résumé, l’égoïsme ne nous domine pas complètement : nous ne préférons pas toujours notre bien au bien d’autrui ; nous ne préférons pas toujours notre plus grand bien à notre moindre bien. Dès lors, la question se pose de savoir ce que nous devons préférer ; il nous faut recourir à la raison, et, recourant à la raison, subir dans leur intégralité les exigences de celle-ci. La raison, comme on a vu, demande que nous cherchions, si nous ne pensons qu’à nous-mêmes, à obtenir la plus grande somme possible de bonheur. Si elle nous demande, en outre, de ne pas faire passer notre bonheur avant le bonheur égal de nos semblables, cette exigence sera de la même nature, elle aura — si éloigné que cela puisse être des idées reçues — exactement la même valeur que celle-là.


Que le principe de l’utilité générale se justifie de la même façon que celui de l’utilité individuelle, et qu’il ait la même autorité que j’avais, au chapitre précédent, reconnue à ce dernier, c’est ce que plusieurs auteurs ont aperçu ou même déclaré en termes clairs et catégoriques. Guyau écrit, dans la conclusion de son étude sur l’utilitarisme anglais : « on pourrait peut-être montrer le germe de la volonté désintéressée au fond même de la volonté égoïste. L’intérêt ne serait autre chose que le premier degré, la période d’enveloppement d’une