Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/206

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pour ce qui est de la morale, de substituer aux difficultés que les doctrines du bien rencontraient des difficultés nouvelles, et non moins graves.

La morale kantienne est une morale formaliste. Et on a pu dire que ce formalisme n’était pas absolu : la forme chez Kant, à ce que représente M. Delbos, serait la condition suprême de l’objectivité, « d’où le conditionné tire, non pas assurément son existence, mais son aptitude à être compris par le jugement moral »[1]. Cette interprétation de M. Delbos est celle-là même que je proposais en disant que l’analyse, pour Kant, ne suffit pas à faire sortir le bien du devoir, en d’autres termes, que Kant ne prétend pas par la seule considération du devoir nous apprendre comment nous devons agir ; à envisager même le bien moral dans sa généralité, ce bien implique, dans la doctrine de Kant, l’idée d’un donné qui s’accordera d’une certaine manière avec les exigences de la raison pratique, qui sera susceptible de recevoir l’application de la forme d’universalité. Il reste cependant que l’accord du donné avec la loi formelle de la raison suffit à rendre moral ce donné, qu’il permet, sans qu’il soit besoin d’aller chercher autre chose, de distinguer les actions bonnes des mauvaises. Je ne me livrerai pas ici à une discussion approfondie du formalisme de Kant : je me bornerai à rappeler brièvement les principales des objections que l’on a adressées à Kant.

La première de ces objections a été présentée par M. Fouillée[2]. Kant est contraint de consentir à ce que

  1. Le kantisme et la science de la morale, Revue de métaphysique, 1900, p. 137.
  2. Systèmes de morale contemporains, IV, 3, 1, pp. 218 sqq.