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Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/74

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tionnelle. M. Rauh a beau user fréquemment de cette dernière épithète, assurer que la raison, entre autres fonctions, a celle de nous donner une certitude pratique immédiate, intuitive en quelque sorte, pour des cas spéciaux ou même singuliers : la raison est essentiellement et uniquement une faculté de généralisation et d’unification, et c’est par un abus inadmissible que M. Raub se sert de son nom et du mot « rationnel » comme il a été vu.

Si la croyance morale est une foi, si c’est ne pas voir ce qu’elle est que de chercher à la justifier ou à la « fonder », la morale ne sera pas autre chose que la notation des croyances morales ; et cette morale ne subsistera qu’autant que les croyances morales dureront elles-mêmes. La question se pose alors de savoir si ces croyances, quand on les entend à la manière de M. Rauh, sont durables, si elles ne portent pas en elles-mêmes un germe de mort destiné à causer tôt ou tard leur ruine, c’est-à-dire celle de la morale.

Cette question, à laquelle j’ai touché déjà à propos de la doctrine de l’école « sociologique », M. Rauh n’a pas manqué de la rencontrer ; et il n’a pas osé y faire une réponse purement négative. Il reconnaît que la science, en particulier la connaissance de l’histoire, peut affaiblir l’efficacité d’un idéal, qu’une croyance tend à se dissoudre au contact de croyances autres. Il déclare toutefois que s’il en est ainsi, c’est parce que l’on pense souvent — à tort — « qu’un idéal n’est justifié qu’à la condition d’être absolu, ou d’être suspendu à une vérité absolue » ; la source de cette sorte de scepticisme moral serait dans « une superstition ma-