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IV

Il me sera permis de ne dire que quelques mots de deux autres erreurs que l’on a souvent commises, touchant l’objet de la morale.

L’une de ces erreurs consiste à limiter le domaine de la morale, à ne pas l’étendre à toute la conduite, c’est-à-dire à tout l’ensemble des actions conscientes. On conçoit qu’il est des actions bonnes, qu’il en est de mauvaises, et qu’il en est enfin d’indifférentes. La morale est faite d’un ensemble de prescriptions négatives et positives ; il y a des défenses qu’elle formule, et il y a des commandements ; parmi ces commandements, au reste, certains sont stricts, ce qui signifie qu’aucune latitude ne nous est laissée ni pour le mode ni pour la mesure de l’exécution, et d’autres, au contraire, sont larges, en sorte qu’il pourra nous être impossible de les exécuter jamais parfaitement : si la morale, par exemple, nous ordonne de secourir nos semblables, notre activité même dirigée tout entière vers cette fin ne suffira pas à réaliser l’idéal qu’on nous propose. Néanmoins il demeure que dans cette conception toutes les circonstances de la vie ne seront pas réglées par la morale, que dans la plupart, même, des alternatives où nous pourrons être placés celle-ci n’interviendra pas, et qu’il nous y sera loisible de suivre notre caprice.

Une telle manière de voir a été de tout temps très répandue, j’entends chez les philosophes eux-mêmes. M. Pillon — pour, ne pas sortir des contemporains —