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Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/93

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relativement au point qui nous occupe, être mise à côté du besoin moral[1].

Le sentiment du devoir est toujours présent et agissant chez tous les hommes, on peut, du moins, l’éveiller à tout instant ; en outre, ce sentiment prend d’autant plus de force que la réflexion s’attache davantage à l’idée qui y correspond.

Et sans doute quelque chose d’analogue peut être dit de tous les sentiments. On voit souvent la force des sentiments s’accroître à mesure que l’attention se fixe davantage sur les objets auxquels ils se rapportent ; on voit même dans les états anormaux, quand ces sentiments sont devenus des passions, l’individu dépenser toutes ses énergies à les satisfaire, ne plus vivre que pour eux. Une différence demeure cependant entre la façon dont les sentiments ordinaires sont renforcés par l’attention et ce que l’on observe d’analogue pour le sentiment moral. L’attention avive les sentiments ordinaires en se concentrant sur l’objet auquel ces sentiments se rapportent, et cet objet est toujours un objet déterminé : celui par exemple qui a dans le cœur une charité ardente verra son zèle redoubler quand il attachera sa pensée aux souffrances de ses semblables ; au lieu que lorsqu’il s’agit du sentiment du devoir, le devoir se présentât-il à nous comme déterminé par rapport à de certaines circonstances, cependant c’est la considération de la notion tout à fait générale, abstraite du devoir qui renforcera notre disposition morale. En sorte que l’on pourrait dire que le

  1. Je dis que nous sommes toujours attires vers le plaisir : je ne dis pas — qu’on veuille bien le noter — que nous préférons toujours le plaisir à la peine, ou le plaisir plus grand au plaisir moins grand.