Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1877, tome 1.djvu/193

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vide, un principe entièrement nouveau, quoiqu’il ne soit pas reconnu comme tel.

Le deuxième livre se termine par une déduction hardie et grandiose, tirée des opinions antérieurement exprimées : la théorie des matérialistes de l’antiquité relativement au nombre infini des mondes qui naissent, à des distances et à des intervalles de temps immenses, à côté, au-dessus et au-dessous les uns des autres, subsistent pendant des milliers d’années (Eons) et périssent ensuite.

Bien au delà des bornes de notre monde visible, se trouvent, dans toutes les directions, d’innombrables atomes qui ne sont pas réunis en corps ou qui ont été dispersés depuis un temps infini ; ils continuent leur chute silencieuse à des intervalles de temps et à des distances que nul ne saurait évaluer. Or comme, de toutes parts, à travers le vaste univers, se retrouvent les mêmes conditions, il en résulte que les mêmes phénomènes doivent se répéter. Au-dessus, au-dessous, à côté de nous, il existe donc des mondes en nombre incalculable. À cette seule pensée, doit s’évanouir la croyance à l’action directrice des dieux dans l’univers. Tous ces mondes sont soumis et la naissance et à la mort, car tantôt ils attirent de nouveaux atomes venant de l’espace illimité, tantôt ils éprouvent des pertes de plus en plus grandes par la désagrégation de leurs parties. Notre terre vieillit déjà. Le vieux laboureur secoue la tête en soupirant et il attribue à la piété de ses ancêtres lest récoltes plus abondantes des temps anciens, tandis que le dépérisse meut du globe est la seule cause de la diminution progressive des produits du sol.

Dans le troisième livre de son poëme Lucrèce déploie toutes les forces de sa philosophie et de sa poésie pour exposer sa théorie psychologique et pour combattre l’immortalité de l’âme. Son but est de faire cesser la crainte de la mort. À cette crainte, qui empoisonne tous les plaisirs purs, le poète attribue aussi une grande partie des passions qui pous-