Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1877, tome 1.djvu/71

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

On voit aisément par cet exemple, que l’hypothèse du hasard n’est, à proprement parler, qu’une négation partielle de la cause finale. La chute de la tuile ne s’explique, à nos yeux, par aucune finalité rationnelle, quand nous la déclarons fortuite.

Si maintenant, avec la philosophie chrétienne, on admet la finalité absolue, on exclut le hasard aussi complètement qu’en admettant la causalité absolue. À ce point de vue, les deux conceptions du monde les plus logiques s’équivalent parfaitement, et toutes deux ne laissent à l’idée du hasard qu’une signification arbitraire et peu pratique. Nous appelons accidentel, ou bien ce dont nous ne comprenons ni le but ni la cause, simplement pour abréger le discours et, par conséquent, d’une manière tout à fait antiphilosophique ; ou bien, nous plaçant à un point de vue exclusif, nous affirmons, contrairement au partisan de la téléologie, la production fortuite du fait, pour ne pas reconnaître les causes finales et cependant nous rejetons le hasard, du moment où nous affirmons que tout fait a une raison suffisante.

Et nous sommes dans le vrai, en tant qu’il s’agit de sciences naturelles ou de sciences exactes ; car c’est uniquement du côté des causes efficientes que le monde des phénomènes est accessible aux recherches de la science. Toute immixtion de causes finales, que l’on place à côté ou au-dessus des forces naturelles, lesquelles agissent nécessairement, c’est-à-dire selon des lois connues, n’est pas autre chose qu’une négation partielle de la science, une défense arbitraire de pénétrer dans un domaine encore inexploré (18).

Mais Bacon tenait déjà la téléologie absolue pour acceptable, quoiqu’il n’en comprît pas encore bien le sens. Cette idée d’une finalité dans l’ensemble de la nature, laquelle ne nous devient compréhensible que pas à pas, dans les détails et par l’étude des causes efficientes, cette idée ne nous conduit réellement à aucune finalité purement hu-