Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1877, tome 1.djvu/99

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d’une fois, il rencontra Platon, son antipode intellectuel, chez Denys de Syracuse. Denys l’estimait plus que les autres philosophes, parce qu’il savait tirer parti de tout ; sans doute aussi parce qu’il se prêtait aux moindres caprices du despote.

Aristippe admettait avec Diogène, le chien, que rien de ce qui est naturel n’est honteux ; aussi la plaisanterie populaire, dit-on, appelait Aristippe le chien royal. Ce n’est pas là une concordance fortuite mais une similitude de principes qui subsiste, malgré la diversité des conclusions de ces deux philosophes. Aristippe aussi était sans besoins, car il avait toujours le nécessaire et, sous les guenilles du mendiant, il ne sentait son existence ni moins assurée ni moins heureuse qu’au milieu d’une pompe royale.

Mais l’exemple des philosophes qui se complaisaient à séjourner dans les cours étrangères et trouvaient ridicule de servir exclusivement l’intérêt bourgeois d’un seul État, fut bientôt suivi par les ambassadeurs d’Athènes et de plusieurs autres républiques. Aucun Démosthène ne pouvait désormais sauver la liberté de la Grèce.

Quant à la foi religieuse, il est bon de le remarquer, en même temps qu’elle diminuait dans le peuple par l’influence des œuvres dramatiques d’Euripide, on voyait surgir quantité de nouveaux mystères.

L’histoire nous a montré trop souvent que, lorsque la classe instruite commence à se moquer des dieux ou à en résoudre la notion en de pures abstractions philosophiques, la multitude à demi éclairée, devenue indécise et inquiète, s’adonne à toute espèce de folies et tente de les élever à la hauteur d’une religion.

Les cultes asiatiques, avec leurs rites étranges, parfois immoraux, obtinrent le plus grand succès. Ceux de Cybèle et de Kottyto, celui d’Adonis et les prophéties orphiques qui s’appuyaient sur des livres saints effrontément fabriqués, se répandirent dans Athènes comme dans le reste de la Grèce.