Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/278

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complète de la théorie de Darwin fait encore défaut. Deux assertions de son critique, dans le Literarisches Centralblatt, fournissent l’occasion de faire une remarque, qui d’ailleurs se présenterait inévitablement à notre esprit, et que nous ne faisons ici que parce qu’elle se présente naturellement à nous : « On préfère, dit le critique anonyme, mettre la possibilité d’heureux hasards à la place de l’action d’une cause située en dehors de l’univers, tendant vers un but, mais agissant d’une manière merveilleuse, et l’on trouve dans le développement successif que reçoit ce qu’un heureux hasard a commencé, une compensation à ceci que tous les phénomènes de l’univers, en dernière analyse, n’ont ni sens ni but, et que le beau et le bien ne se rencontrent pas au commencement, mais seulement à la fin ou du moins au milieu du cours des temps. Tant que ces découvertes (probantes) n’auront pas été faites, il sera permis de se demander si les hypothèses que ce naturalisme croit avoir le droit d’imaginer, sont moins hardies et risquées que les présuppositions de la conception téléologique de l’univers. »

Ce critique est un type ; la plupart de ceux qui, en face de la science actuelle de la nature, pensent encore devoir s’en tenir à la téléologie, se cramponnent aux lacunes de la connaissance scientifique, et ne voient pas qu’au moins la forme antérieure de la téléologie, la forme anthropomorphique, a été complètement éliminée par les faits, peu importe que la théorie naturaliste soit suffisamment établie ou non. La téléologie entière à ses racines dans l’idée que l’architecte des mondes agit de telle sorte que l’homme est forcé de trouver que ses actes visent un but à la façon de la raison humaine. Telle est déjà au fond la doctrine d’Aristote, et même la théorie panthéistique d’un but « immanent » maintient l’idée d’une finalité répondant à l’idéal humain, dût-elle supprimer la personne placée en dehors de l’univers, laquelle, à la façon des hommes, imagine d’abord ce plan et le réalise ensuite. Or il est aujourd’hui