Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/28

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sions qu’on tire de ces définitions. Ce qu’on appelle axiomes se compose en grande partie exclusivement de définitions ou peut s’y ramener. Le reste, particulièrement les propositions fondamentales de la géométrie d’Euclide, que deux lignes droites ne peuvent pas circonscrire un espace, et que deux parallèles prolongées à l’infini ne peuvent jamais se rencontrer, ces axiomes seuls réels ne sont que des généralisations dérivant de l’expérience, des résultats d’une induction. Ils n’ont donc pas non plus la nécessité rigoureuse, propre aux définitions ou, pour parler comme Kant, à tous les jugements analytiques. Leur nécessité, dans notre conscience, n’est que subjective et doit être expliquée psychologiquement. Elle s’impose à notre esprit, comme nous nous imaginons qu’il y a une nécessité à admettre même des propositions qui ne sont pas du tout vraies, ou comme nous déclarons incompréhensible et inimaginable ce que peut-être nous-mêmes avons antérieurement regardé comme vrai. Si les axiomes mathématiques naissent ainsi purement de l’association des idées, et, considérés psychologiquement n’ont pas de meilleure origine que maintes erreurs, il ne s’ensuit pas cependant que nous devions craindre de les voir réfuter un jour ; mais il en résulte bien que la certitude que nous leur attribuons ne dérive pas d’une autre source que celle de nos connaissances empiriques en général, lesquelles nous apparaissent, suivant la force de l’induction qui les produit, comme vraisemblables, certaines ou absolument nécessaires.

D’après cette théorie, il y a donc, dans la mathématique, des jugements synthétiques, mais ces jugements n’existent pas a priori ; il y a des jugements a priori, mais ils ne sont qu’analytiques ou, comme dit Mill, identiques.

Dans l’application aux objets de l’expérience, tous les jugements, d’après cette théorie, n’ont qu’une valeur hypothétique. La nature ne nous offre nulle part les formes pures de la géométrie, et jamais une formule algébrique ne repré-