Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/291

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par cette conception de la « théorie de la transmutation nombre d’objections qu’on lui a opposées, tandis que, d’autre part, le système de Darwin est modifié sur un point essentiel. La théorie de Darwin est parallèle à la géologie de Lyell, en ce que l’importance la plus grande est attachée aux modifications silencieuses et continues, bien qu’imperceptibles pour l’observation ordinaire, qui se réalisent sans interruption, mais dont le résultat ne devient visible qu’après de très-longs espaces de temps. Sur cette base, Darwin admet que les modifications des espèces se produisent d’abord d’une manière purement fortuite et que la majeure partie disparaît sans avoir acquis d’importance, comme les monstruosités ordinaires, tandis qu’un petit nombre de modifications favorables l’être en question dans la lutte pour l’existence se maintiennent et acquièrent de la fixité par la sélection naturelle et par l’hérédité.

Nous devons naturellement, dans notre théorie, avouer qu’il peut se produire des changements de forme très-lents, surtout quand ils sont provoqués par des modifications très-lentes des conditions d’existence, comme par exemple dans l’exhaussement ou l’affaissement insensibles de contrées entières. Il est vrai que, même dans ce cas, nous trouverons plus vraisemblable une certaine force de résistance opposée par les formes organiques à la modification de leurs conditions vitales, résistance qui conserve leur intégrité jusqu’à ce que les influences perturbatrices, parvenues à un certain degré, amènent une crise perturbatrice. Nous n’excluons cependant pas l’hypothèse d’une transformation lente et nous ne demandons même pas que notre idée de la réalisation d’un état d’équilibre soit entendue dans le sens d’un état d’invariabilité absolue. Par contre, on doit évidemment révoquer en doute le développement d’espèces nouvelles par la naissance purement fortuite de propriétés nouvelles, en tant, du moins, qu’on veut y voir précisément le levier principal du changement.