Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/427

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rapports numériques déterminés le penchant qui porte un poëte à des formes de versification plus ou moins difficiles (51), sans tenir compte en général du cerveau et des nerfs. Ici un critique pourrait s’aviser de dire : Il faut ou bien admettre que le fait est indépendant des lois de la physiologie, ou que la méthode n’est pas strictement scientifique, parce qu’elle ne remonte pas jusqu’à la cause présupposée des phénomènes. Mais ce dilemme serait mal posé, parce que des faits acquis empiriquement et même les « lois empiriques » maintiennent leurs droits, tout à fait indépendamment de la réduction aux causes des phénomènes. On pourrait d’ailleurs s’appuyer sur le même raisonnement pour déclarer insuffisante toute la physiologie des nerfs, parce qu’elle n’a pas encore été ramenée à la mécanique des atomes, qui cependant doit être la base dernière de toute explication des phénomènes de la nature.

En Angleterre, du temps de Dugald-Stewart et de Thomas Brown, la psychologie était en bonne voie de devenir une science empirique de la succession des représentations, la « psychologie d’association » ; ce dernier surtout poursuit le principe d’association avec esprit et sagacité à travers les terrains les plus variés de l’activité psychologique. Depuis cette époque, les Anglais ont pris goût à la psychologie, et il est incontestable que l’étude de leurs ouvrages fournit à l’homme d’État, à l’artiste, au professeur, au médecin, une plus grande abondance de documents pour la connaissance de l’homme que ne saurait le faire notre littérature psychologique allemande. D’autant plus faible est la sûreté critique des principes et la forme rigoureusement scientifique de cette psychologie. Sous ce rapport, aucun progrès essentiel n’a été fait, au fond, depuis Brown et Stewart. Ce qui distingue les ouvrages récents de Spencer et surtout de Bain (52), c’est le parti qu’ils savent tirer de l’anatomie et de la physiologie actuelle et leur tentative énergique pour concilier la psychologie associationniste avec notre connaissance du système nerveux et de ses