Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/431

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rien du tout ; par contre la psychologie d’association nous fait connaître, par la voie de l’empirisme méthodique, une série de lois : contentons-nous donc de ces lois, sans nous préoccuper de savoir si les phénomènes de la série des pensées apparaîtront ou non peut-être plus tard comme de simples produits de l’activité du cerveau. C’est ainsi que l’on écarte la question métaphysique et que l’on garantit à la psychologie d’association des droits au moins provisoires. Mais la question plus grave et qui nécessite l’intervention de la critique n’est pas discutée : en redoublant d’attention, ne finirons-nous point par découvrir même dans la psychologie d’association des preuves que ses prétendues lois n’ont pas de valeur absolue, précisément parce qu’elles ne représentent qu’une portion des conséquences de lois physiologiques plus profondes ?

Herbert Spencer, se rapprochant de notre propre point de vue, admet un matérialisme du phénomène, dont la valeur relative rencontre ses limites dans la science de la nature, et ces limites se trouvent dans la pensée d’un absolu inconnaissable. Aussi aurait-il pu tranquillement se ranger du côté de Comte pour ce qui concerne le domaine du connaissable. Il affirme cependant que la psychologie est une science unique en son espèce et complètement indépendante de tout autre domaine (54). Il est amené à cette affirmation par le fait que l’élément psychique seul nous est donné immédiatement, tandis que l’élément physique n’est que présupposé et se laisse par conséquent résoudre, dans un certain sens, en élément psychique. Effectivement nos représentations de la matière et de ses mouvements ne sont qu’une espèce de représentations. Mais le son et la couleur, tels qu’ils apparaissent immédiatement notre esprit, nous sont, comme les mouvements de l’âme, donnés plus tôt que la théorie de leur naissance résultant de vibrations et de processus du cerveau. Il suit de là que le domaine des phénomènes psychiques possède l’indépendance que Spencer attribue à la