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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/432

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psychologie. Mais la question est précisément de savoir si le domaine des phénomènes psychiques peut être converti en un enchaînement causal sans qu’il soit nécessaire de le ramener aux théories des sciences physiques.

Alexandre Bain veut bien se soumettre à un « matérialisme prudent et modéré », qui conserve l’opposition entre l’esprit et la matière. D’après lui, comme d’après Spencer, le corps est, sous le point de vue objectif, la même chose que l’âme, sous le point de vue subjectif, dans la conscience immédiate de l’individu. En vertu de cette pensée, que l’on peut faire remonter à Spinoza et à laquelle Kant donnait la valeur d’une conjecture, Bain se laisse entraîner à admettre un parallélisme complet entre l’activité intellectuelle et l’activité nerveuse. D’après sa théorie, chaque excitation nerveuse a un « équivalent sensationnel » (55). S’il en était ainsi, la connexion, sous le rapport psychique, serait assurément aussi complète que sous le rapport physique ; mais cette théorie est contredite par les faits. Déjà la loi de la relativité, admise par Bain, loi en vertu de laquelle nous arrivons à une sensation consciente non tant par l’énergie absolue de l’excitation que par le fait d’un changement de l’état d’excitation (56), est inconciliable avec l’équivalent sensationnel ; car il est clair que, d’après cela, une seule et même excitation nerveuse peut une fois provoquer une sensation très-vive, une autre fois n’en provoquer aucune. Si néanmoins par « équivalent sensationnel » on voulait entendre quelque chose qui appartient au côté interne et subjectif du phénomène, mais qui cependant n’est pas une sensation proprement dite, on arriverait aux idées inconscientes dont nous aurons bientôt à parler.

Ici la stricte validité des lois d’association doit aussi devenir très-douteuse pour nous. Il est vrai que, pour marcher à pas sûrs, Spencer emploie ici la formule magique : « all other things equal » (toutes les autres choses étant égales). Sans doute, si toutes les autres circonstances sont absolument égales, il semblera presque vrai comme un axiome que l’impres-