Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/470

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

probablement aussi à des transformations importantes, peut-être encore infiniment plus importantes ?

À cela les lois mathématiques ne peuvent rien changer Imaginons-nous donc, pendant un instant, un être qui ne puisse se représenter l’espace qu’avec deux dimensions. Imaginons-le entièrement d’après la plaque animée de la chambre (obscure) d’Ueberweg. N’y aurait-il pas aussi pour cet être une connexion mathématique des phénomènes encore qu’il ne pût jamais concevoir la pensée de notre stéréométrie ? L’espace relativement réel, c’est-à-dire notre espace avec ses trois dimensions comparé à son monde des phénomènes, peut être pensé comme « chose en soi ». Alors la connexion mathématique entre le monde occasionnant et le monde des phénomènes de cet être ne subit aucune modification, et cependant de la projection plane, dans la conscience de ce dernier, ne peut être déduite aucune conclusion sur la nature des choses occasionnantes.

On verra aisément que, d’après cela, on peut aussi se figurer des êtres concevant l’espace avec plus de trois-dimensions, encore que nous ne puissions absolument pas nous représenter l’intuition de pareils êtres (65). — Il est inutile de continuer à énumérer de semblables possibilités ; il nous suffit au contraire entièrement de constater qu’il y en a une infinité, et que, par conséquent, la validité de notre conception du temps et de l’espace pour la chose en soi paraît extrêmement douteuse. Il est vrai que, de la sorte, on ne peut plus soutenir aucun matérialisme quelconque ; car alors même que nos recherches, bornées à des conceptions sensibles devraient, avec une logique irrésistible, tendre à démontrer pour chaque excitation intellectuelle des faits correspondants dans la matière, cette matière elle-même n’en est pas moins, avec tout ce qui est formé d’elle, une simple abstraction de nos images de représentation. La lutte entre le corps et l’esprit est terminée à l’avantage du dernier ; ainsi commence à être garantie la véritable unité de ce qui existe. Car si, d’un