Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/501

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créateur des formes, qui sert de base à cette tendance vers l’harmonie, dans le monde moral, comme aux aspirations de l’art. Et, de fait, nous avons déjà vu se réaliser ce progrès de l’état sauvagé vers la civilisation si souvent et, malgré les circonstances les plus diverses, si uniformément, qu’une certaine autorité s’attache déjà au seul argument par induction qui démontre que tout ce phénomène s’opère par une nécessité naturelle ; mais quand nous avons fini par découvrir, dans nos éléments sensoriels eux-mêmes, la cause de cefait, nous ne pouvons plus douter de l’existence du principe moteur ; seulement nous pouvons nous demander si, dans un temps, chez un peuple ou chez un groupe de nations donnés ce principe est supérieur à d’autres forces également puissantes qui, soit par elles-mêmes, soit par un concours particulier, pourraient amener un résultat absolument contraire.

Le progrès de l’humanité n’est pas continu, c’est ce que nous apprend chaque page de l’histoire ; on peut même douter qu’il existe dans le grand tout un progrès pareil à celui que nous voyons, sur un point particulier, tantôt s’épanouir, tantôt disparaître. Il me semble toutefois incontestable, même a notre époque, qu’à côté des fluctuations de la culture, que nous discernons si clairement dans l’histoire, s’opère en même temps un progrès continu, dont les conséquences ne sont cachées que par les fluctuations dont je viens de parler ; néanmoins cette notion n’est pas aussi positive que celle d’un progrès isolé, et l’on trouve des penseurs sérieux, aussi versés dans la connaissance de la nature que de l’histoire, qui, comme Volger, nient ce progrès. Mais en admettant que ce progrès fut complètement certain dans la période historique sur laquelle nous jetons un coup d’œil d’ensemble, ce pourrait bien n’être qu’une vague plus grande, pareille à celle du flux, qui monte toujours, tandis que se déroulent les montagnes et les vallées sur la mer agitée et qui finit par atteindre sa plus grande hauteur pour reculer continuellement sous l’action de la