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Newton « expliquait » les mouvements compliqués des astres par l’existence d’attractions s’exerçant à distance entre des corps mobiles dans un espace invariablement euclidien, rigide, indéformable ; la relativité admet au contraire que chaque corps influe sur les propriétés de l’espace et du temps où il se trouve, modifie et incurve l’espace-temps, déformation qui agit à son tour sur le mouvement des corps voisins[1].

Il ne résulte de là rien d’autre que la substitution d’une loi générale d’interdépendance, loi dialectique, au mystère impénétrable de l’attraction à distance selon Newton. La science corrobore donc ce que le matérialisme dialectique avait toujours affirmé : le monde entier n’admet qu’un absolu, l’abstraction du mouvement ; la nature est l’interaction des différents mouvements, tous à caractère relatif ; de même, l’espace et le temps sont interdépendants (associés dans une unité, dite espace-temps) comme ils sont relatifs à leur contenu, et non pas fixes, inflexibles, impossibles à « incurver ».

La science elle-même, à l’instar de l’univers matériel, est en perpétuel mouvement et innovation. Langevin écrit dans une note inédite :


Processus dialectique du développement de la science parallèle au processus dialectique du développement de l’histoire et de la vie.


L’« effort violent » de la science[2] est provoqué chaque fois par la nécessité de surmonter une contradiction qui se forme[3]. Elle triomphe des idées périmées par des idées nouvelles qui semblent d’abord « paradoxales » et « diaboliques » (Langevin aimait à

  1. Paul Langevin : La valeur éducative de l’histoire des sciences, pp. 694-695.
  2. Ibidem
  3. 20 mai 1937, discussion de la conférence de MM. Louis de Broglie et Edmond Bauer sur les modalités de l’invention ; l’invention scientifique.