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la gloire du terme qui ait saisi, au bout d’un long effort, l’unité dialectique de l’identité et de la différence dans le phénomène physique et proclamé la vérité et la nécessité du marxisme à partir des démarches et des résultats de la physique.

Langevin, — l’homme dont Albert Einstein a dit :


Il me paraît certain qu’il aurait développé la théorie spéciale de la relativité si cela n’avait été fait ailleurs ; car il en avait clairement reconnu les points essentiels[1]


a été définitivement conduit au matérialisme dialectique par cette théorie de la réalité, qui a détruit, pour reprendre un de ses mots, les dernières idoles métaphysiques — l’espace absolu, le temps absolu, la masse absolue — en apportant, après tant d’autres preuves, une confirmation éclatante du mode de penser marxiste.

De cette négation de tout mouvement absolu, les sophistes de l’idéalisme ont essayé de tirer la conclusion que… le mouvement n’existe pas en réalité. Einstein prouve juste le contraire : il prouve qu’il n’y a que le mouvement de réel. Dès lors, tout mouvement particulier, c’est-à-dire tout existant, est relatif.

La philosophie et la science non dialectiques, le mécanisme classique supposaient un espace abstrait où les choses se déplaçaient. De même, un temps abstrait où les événements se produisaient. Einstein a montré que l’espace et le temps sont simplement des manières d’être de l’univers et non des conditions préalables, non des cadres absolus indifférents à leur contenu et au fait même d’avoir un contenu. L’univers n’est pas comme nous, qui avons besoin d’un espace autour de nous pour nous mouvoir ; l’univers est toute chose en tout lieu, et il n’y a pas d’espace plus large que lui où il puisse aller et venir. Pareillement, il est la succession même des événements et il ne saurait donc s’insérer dans un temps-cadre extérieur à lui.

  1. La Pensée, no 12, mai-juin 1947, p. 14.