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Page:Langevin - La physique depuis vingt ans, 1923.djvu/441

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fréquemment utilisé cependant, par exemple dans la loi de variation de la densité d’un corps avec sa température.

L’élève qui demande à la science uniquement sa culture emporte de cet ensemble l’impression que les physiciens sont des croyants d’une espèce singulière, qui s’amusent à regarder dans des lunettes et à construire des courbes avec une activité aussi dispersée qu’inutile. Quant au futur technicien, il sort de là chargé d’une collection de lois et de formules dont il saura qu’elles sont généralement fausses sans savoir d’ailleurs pourquoi ni dans quel sens. L’école spéciale contribuera encore à alourdir l’amas des faits qu’il emmagasine, que ses bras ont peine à retenir parce qu’il manque un lien qui les attache ensemble, utiles aujourd’hui, inutiles demain en raison des modifications continuelles et brusques des industries actuelles.

Des idées générales, claires et bien groupées, lui laissent au contraire la souplesse nécessaire pour assimiler les faits à mesure des besoins, et le sens vivant du progrès lui permet de jeter à propos le lest des choses surannées ; tandis que les dogmes inflexibles ne peuvent que se briser au contact des faits contraires et laissent désarmé celui qui les reçut, heureux encore quand lui-même n’en a pas subi de déformation permanente.

Je me rappelle avoir eu, et beaucoup comme moi sans doute, cette impression de science définitive et morte que donne l’enseignement dogmatique des lois et des faits, faisant participer la physionomie des savants eux-mêmes à l’immuabilité des prin-