Page:Langevin - La physique depuis vingt ans, 1923.djvu/449

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par des termes nouveaux dans une équation, termes dont la forme arbitraire n’est indiquée que par de superficielles analogies. N’y a-t-il pas là une tendance fâcheuse à limiter le champ (les investigations, à déclarer suffisante et définitive une con-naissance générale et superficielle des choses, à s’interdire un examen plus approfondi parce qu’un premier succès nous a livré quelques-unes des lois les plus générales ? Savons-nous ce que donnera notre marche en avant, l’examen au microscope de l’organisme que nous voyons vivre ; quels motifs de crainte avons-nous ? Pourquoi ce retour en arrière, cet ignorabimus contre lequel protestent nos instincts et nos convictions ? Nous sommes issus d’une évolution lente, en contact continuel et profond avec l’univers qui nous a modelés ; de nos instincts obscurs résulte un sentiment d’identité et de communauté avec toute la nature : notre science est un effort pour pénétrer plus profondément et plus consciemment en elle, et nous permettons difficilement qu’on élève des barrières à notre connaissance, qu’on trace une frontière à l’inconnaissable dans la crainte peut-être de ce qui se trouve au delà. Si nous sommes jusqu’ici restés à la surface des choses rien ne peut nous faire prévoir les découvertes futures, les sensations nouvelles que nous devrons classer ; les hypothèses qui paraissaient les plus hardies n’étant que la prévision de ces sensations nouvelles, nous devons pour en tenir compte être prêts à modifier nos constructions autant qu’il sera nécessaire.