Page:Langlois - Harivansa ou histoire de la famille de Hari, tome 1.djvu/139

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à naître lui-même, et cet avatare[1] d’Indra fut le roi Gadhi. C’est pour cette raison que, fils de Cousica, le roi des dieux est surnommé Côsica. Il eut pour épouse Pôroucousî, qui lui donna un fils nommé Gâdhi.

Ce Gâdhi eut une fille belle et vertueuse, appelée Satyavatî, qui fut donnée pour épouse à Ritchîca, fils de Soucra et petit-fils de Bhrigou. Gâdhi avait préparé un sacrifice à l’effet d’obtenir un fils. Ritchîca dit alors à son épouse : « Il faut t’unir à ta mère pour ce sacrifice. Voici deux offrandes, l’une pour toi, l’autre pour elle. Ta mère aura un fils, brillant de gloire et célèbre parmi les Kchatriyas, qui ne pourront le vaincre et dont il sera le fléau. Au contraire, la vertu de cette autre ofirande te donnera un fils plein de fermeté, d’amour pour la pénitence, et de résignation il sera fameux parmi les Brahmanes. » Ainsi parla à sa femme le petit-fils de Bhrigou ; et toujours occupé de ses austérités, il se rendit à la forêt. Cependant Gâdhi, accompagné de son épouse, arriva à l’ermitage de Ritchîca pour visiter sa fille, profitant de l’occasion du voyage[2] qu’il faisait à l’étang consacré. Satyavati prenant les deux offrandes préparées par le saint Richi, s’empressa de les montrer à sa mère ; celle-ci les toucha et, par une fatalité inexplicable, se trompa en les remettant à sa fille : elle lui rendit celle qui lui était destinée à elle-même, et, au moment du sacrifice, elle obtint, par le fait de cette erreur, un fruit qui n’était point pour elle. Satyavatî au contraire conçut un enfant qui un jour devait être le fléau des Kchatriyas, héros à la forme lumineuse, à l’aspect effrayant. Ritchîca, par la force de sa dévotion, vit la méprise qui avait eu lieu ; il revint auprès de sa femme et lui dit : « Tu as été trompée par ta mère, et ton sacrifice aura un effet contraire à celui que tu attendais. Ton fils sera un jour terrible et cruel dans ses œuvres : ton frère sera un pénitent que l’on pourra regarder comme la science divine incarnée : car j’ai réuni en lui pour composer ce personnage et l’amour de notre loi sainte, et le goût de la mortification. » Tel fut le discours de Ritchîca à l’illustre Satyavatî. Celle-ci chercha à fléchir son


    marques ressemblant à l’organe féminin, est racontée dans le Râmâyana. Le dieu avait abusé d’Ahalyâ, femme du Mouni : celui-ci consentit plus tard à ce que ces cent marques devinssent autant d’yeux. On a dit que ces yeux représentaient les étoiles, Indra étant dieu du ciel.

  1. Un avatare est l’incarnation d’un dieu qui descend dans un corps terrestre. On distingue l’avatare complet de l’avatare partiel, ou ansavâtare : ce dernier a lieu quand ce n’est qu’une portion de la divinité qui revêt des organes matériels. Ici, il est question d’un ansâvatare. Voy. lect. liv, note 1.
  2. Ce voyage porte le nom d’yâtrâ.