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[Lect. I.]
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RIG-VEDA. — SECTION DEUXIÈME.

faites que ces (vénérables) mères[1] soient favorables au vertueux Ayou[2].

5. Moi, fils d’Ousidj, comme Ghochâ[3] quand elle fut affligée de la lèpre, je vous offre une prière suppliante. Pour vous, et en l’honneur du généreux Poûchan, je fais dresser le foyer d’Agni.

6. Mitra et Varouna, écoutez mes invocations. Écoutez (la prière qui s’élève vers vous) en ce lieu, de tout côté[4]. Que Sindhou[5], avec ses ondes, nous entende, et, sensible à nos vœux, nous accorde ses heureux dons !

7. Je chante (vos louanges), ô Mitra et Varouna ! Parmi les biens que vous apportez, que Padjra[6] doive à votre faveur des centaines de vaches. Qu’il se complaise dans ses chars renommés ; que (les dieux viennent) l’environner d’un bonheur continuel.

8. Mes chants vous recommandent le (maître) généreux ici présent. Nous autres, (simples) mortels[7], puissions-nous avoir des richesses et une bonne lignée ! Le chef qui, au milieu des Padjras, se distingue par sa libéralité, est aussi prodigue[8] pour moi de chevaux et de chars.

9. Ô Mitra et Varouna, le chef qui vous refuse ses libations, adressant ailleurs son hommage, (se déclare) votre ennemi. Dans son sein réside le mal, tandis que celui qui se conforme au devoir du sacrifice obtient ce qu’il désire.

10. Qu’un adversaire puissant se présente ; le (chef pieux) est fort dans ses œuvres ; ses hommes sont plus robustes, ses ressources plus grandes. Il va, comblé de biens, toujours ferme dans les combats, toujours héroïque (dans ses actions).

11. Qu’ainsi marchent les hommes. Vous, rois (célestes) qui aimez l’ambroisie (du sacrifice), écoutez l’invocation de leur chef. Accourez du haut des airs ; car vos bienfaits sont promis à nos hymnes, et donnent la grandeur au maître des chars.

12. Puissions-nous partager la force de ce chef pour lequel je vous ai invoqués, en récompense des offrandes que nous vous présentons à dix reprises[9]. Que les Viswas, pour lesquels nous allumons ce foyer (sacré), nous accordent leurs dons ; que l’abondance soit le prix de nos sacrifices.

13. Avec joie nous présentons ces offrandes que portent dix personnes. Que (notre chef) ait les chevaux et les rayons (de gloire) qu’il désire. Que les seigneurs ici présents soient vainqueurs, et donnent à leurs gens de riches parures.

14. Que les Viswas nous accordent de l’or pour nos pendants d’oreille, des pierres précieuses pour nos colliers. Que la prière du maître[10], montant vers eux, appelle sur nous deux[11] les vaches[12] (fécondes).

15. Que les quatre fils de Masarsâra, que les trois (enfants) du roi vainqueur Ayavasa, ne (puissent prévaloir sur nous). Ô Mitra et Varouna, faites heureusement briller, tel que celui du soleil, votre char aux larges formes !


HYMNE II.

À l’Aurore, par Cakchivan.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le large char de l’heureuse déesse est attelé ; les dieux immortels[13] sont placés sur ce char. La noble habitante des airs est sortie du sein des ténèbres, pour parer le séjour humain.

2. La première du monde entier, elle se lève, et répand glorieusement au loin ses bienfaits. Toujours jeune, toujours nouvelle, l’Aurore renaît pour éveiller (la terre) ; elle vient la première à l’invocation du matin.

  1. Il est naturel de donner le nom de mères aux eaux qui fécondent et nourrissent la nature.
  2. Ce mot, analogue aux mots Manou, Poûrou, Nahouch, signifie en cet endroit homme.
  3. Voy. page 116, col. 1, note 5.
  4. Il faut supposer que le foyer est entouré d’adorateurs qui répètent des invocations.
  5. C’est l’Océan, ou l’élément humide. Ce peut être encore le soma.
  6. Le commentateur regarde le mot Padjra comme un nom de Cakchîvân. Je distingue ces deux noms : l’un est celui d’un chef de tribu ; l’autre est celui du poëte, qui devait appartenir à la tribu des Padjras. Voyez page 73, col. 2, note 6 ; page 114, col. 1, note 2.
  7. Le poëte emploie ici et plus bas encore le mot Nahouch, que j’explique comme le mot âyou, note 2, plus haut.
  8. Souri, formé de la racine chou, signifie donateur. Il s’entend du chef qui fait les frais du sacrifice ; quelquefois aussi du prêtre qui l’offre. Voy. page 114, col. 1, note 2 ; page 73, col. 2, note 6.
  9. Le mot ainsi rendu est Dasataya. C’est, dit le commentaire, le soma offert dans dix vases, ou des mets qui réjouissent dix organes ; ou bien enfin une offrande présentée sous dix formes différentes. Un autre sens est donné dans le vers suivant. J’ajouterais encore une autre explication : le soma extrait avec les dix doigts.
  10. Ari, le père de famille.
  11. C’est-à-dire le prêtre et le chef de tribu.
  12. Suivant le commentateur, le poëte désigne par ce mot ou les nuages, ou les choses nécessaires au sacrifice, et provenant de la vache.
  13. Le char attelé en l’honneur d’un dieu, c’est le sacrifice : les dieux ou dévas immortels ici mentionnés pourraient bien être les prêtres eux-mêmes.