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PRÉFACE.

sophie domine les autres sciences qu’elle a fait naître, et Kapila, Patandjali, paraissent dans l’Inde ; Salomon, chez les Hébreux ; Lâo-Tseu, Confucius chez les Chinois ; Socrate, Platon, Aristote, en Grèce ; Lucrèce et Cicéron à Rome. La religion elle-même incline vers la philosophie dans la réforme de Çakya-Mouni et de Zoroastre. L’éloquence politique et le théâtre brillent dans la littérature, à laquelle ils donnent, par l’effet de l’idée et de sa vivante représentation, une double force. De grands noms surgissent en Grèce et à Rome, dans l’éloquence politique, Periclès, Eschine, Démosthène, Caïns Gracchus, Hortensius, Cicéron ; de grands noms dans le théâtre, Eschyle, Sophocle, Euripide, Aristophane, Accius, Plante, Térence. L’histoire s’élabore, chez les Grecs, avec Hérodote ; chez les Latins avec Tite-Live ; et elle se prépare à sortir de la littérature pour entrer dans les sciences sociales, avec Thucydide et Xénophon en Grèce, César et Salluste à Rome. La poésie lyrique, si elle n’a pu conserver l’enthousiasme et l’abondance des temps primitifs, a gagné en art, en prestige, en ampleur avec Pindare, et s’est alliée à la philosophie avec Horace. L’épopée est devenue littéraire avec Virgile. La sève monte dans toutes les branches de la vie nationale ; rien ne reste inerte, rien n’est infécond ; il y a floraison, épanouissement, fructification ; c’est, à notre avis, la période d’expansion de l’intelligence.

Plus tard enfin, ou la réforme religieuse, qui contenait des éléments de progrès, a été vaincue, comme le bouddhisme dans l’Inde, absorbée et défigurée comme le mazdéisme en Perse ; ou la défense de l’unité nationale, plusieurs fois brisée, est devenue impossible par l’extinction de toute force organisatrice, comme en Égypte ; ou la scission de l’unité politique a ouvert le pays à tout envahisseur, comme chez les Hébreux ; ou la liberté a péri au milieu de la discorde dissolvante des partis, comme en Grèce ; ou les conquêtes, par lesquelles on avait étendu le territoire national, sont devenues une arme destructive pour les conquérants eux-mêmes, comme à Rome ; ou la dissolution politique a empiété sur le savoir et l’a nivelé, avec le reste, comme en Chine ; la dernière heure a sonné, peu importe comment, jusqu’à une renaissance plus ou moins retardée, pour chacun de ces peuples. La sève s’arrête ; l’arbre n’a plus de vie, ses fleurs s’étiolent, ses branches se sèchent, la philosophie est sans école, les sciences sont sans interprètes ; la poésie lyrique n’a plus ni spontanéité, ni vigueur, parce qu’elle n’est plus inspirée par de hauts sentiments personnels ; l’épopée populaire des périodes d’organisation, suivie de l’épopée littéraire des périodes d’expansion, devient froide ou déclamatoire parce qu’elle ne répond plus à de hauts sentiments de collectivité. Le théâtre se ferme ou s’avilit ; le genre didactique domine seul par la satire âpre et mordante ; il n’y a plus de goût, il n’y a plus de moralité, il n’y a plus d’idées ; aussi écrit-on beaucoup, moralise-t-on beaucoup, sans pouvoir autre chose que com-