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[Lect. VIII.]
INDE. — POÉSIE LYRIQUE.

Dans le lieu où se font les libations du soma, où s’accomplit le sacrifice, là sont présentes les Ondes de Ghrita.

10. Venez vers l’endroit où se distribuent la louange et le beurre de la libation. Donnez-nous vos précieux trésors. Ô déesses[1], dirigez notre sacrifice. Les Ondes de Ghrita sont ici présentes, aussi douces que le miel.

11. Le monde entier existe par toi. Le flot suave de tes splendeurs coule au vase des libations[2], dans le cœur (de l’homme), dans toute la vie, dans les ondes (célestes) comme dans le foyer (solaire). Puissions-nous en jouir pleinement !


HYMNE IX[3].

À Agni, par Boudha et Gavichthira, fils d’Atri.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Agni s’est éveillé au foyer qu’allument les hommes et à l’arrivée de l’Aurore, qui est la vache (bienfaisante du ciel). Tels que les branches qui s’étendent (sur l’arbre), les grands Rayons se répandent dans les airs.

2. Oui, Agni le sacrificateur s’est éveillé pour honorer les dieux ; il se dresse, et se présente le matin avec bonté. Ses feux s’allument, il brille, et sa force se développe à nos yeux. Le grand dieu se débarrasse des ténèbres.

3. Quand Agni vient comme s’enchaîner au milieu de nos cérémonies[4], il revêt toute la splendeur de ces (rayons, qui sont) les vaches (du sacrifice). En même temps l’Aurore, avide de nos libations, attelle ses coursiers. (Agni) se lève devant elle, et lui porte la liqueur onctueuse que versent les coupes.

4. Les âmes des fidèles se portent vers Agni, comme les yeux vers le Soleil. Il est enfanté par l’Aurore et le Soir[5] tous deux de couleur différente. Cependant au début des jours naît (celui que l’on appelle) le cheval blanc[6].

5. Oui, au début des jours il naît, ce (dieu) doux et brillant ; il resplendit sur le bûcher qui l’a reçu. Agni, sacrificateur adorable, siége dans toutes les maisons, orné de sept rayons précieux.

6. Oui, Agni, sacrificateur adorable, siége au sein de sa mère[7] sur un trône fortuné ; jeune, sage, juste, soutien (des êtres), il se plaît dans plus d’une demeure ; mais il brille (en ce moment) au milieu des hommes.

7. Agni, sage et bon, préside à nos sacrifices, et nous l’honorons lui-même par nos invocations. Par la vertu de l’holocauste, il a étendu le ciel et la terre ; et (les hommes) lui adressent le perpétuel hommage de leurs offrandes et de leurs libations.

8. Digne d’être honoré, il reçoit nos libations, dans sa propre demeure, sous le nom de Damoûnas[8] : célébré par les poëtes, heureux hôte pour les mortels. Généreux et brillant Agni, nous te reconnaissons mille têtes, et par ta force tu surpasses tous les êtres.

9. Ô Agni, tu visites sans doute les autres (sacrifices) ; mais il n’en est aucun qui doive être pour toi plus agréable (que le nôtre, sacrifice) où l’hôte chéri de la race humaine nous apparaît beau, éclatant, adorable.

10. Ô Agni toujours jeune, les hommes, de loin comme de près, t’apportent leur offrande. Écoute la prière de celui qui t’invoque avec ardeur. Ô Agni, ta protection est grande, étendue, fortunée.

11. Brillant Agni, avec les (autres dieux) que nous honorons, monte aujourd’hui sur ton char large et resplendissant, et, dans ta sagesse, amène ici ces dieux par le vaste chemin de l’air, pour qu’ils goûtent à notre holocauste.

12. Faisons une invocation en l’honneur d’un (dieu) sage, fort, généreux et digne de nos hommages. De même que le Soleil éclaire le ciel, cet hymne respectueux de Gavichthira glorifie Agni.

  1. Ce passage pourrait aussi s’entendre d’une invitation aux hommes qui font le sacrifice.
  2. Le Ghrita, le beurre vivifiant d’Agni, circule dans toute la nature. Il n’est pas seulement dans le sacrifice, il est dans le cœur de l’homme en qualité de Sarwaprâna, dans les nuages comme Vêdyoutâgni, dans le soleil comme Sôryâgni. Le commentaire, qui donne à samadrou le sens de mer, pense que Ghrita, au sein de la mer, est Badavagni.
  3. Ici se termine le quatrième Mandala, qui porte le nom de Vâmadéva. Le cinquième va commencer, avec le nom d’Atri.
  4. Cette même idée se trouve plus haut, lecture IV, hymne VIII, stance 6.
  5. Allusion aux sacrifices du matin et du soir. Le texte porte les deux Aurores (Ouchasâ).
  6. Agni qui brille pendant le jour. Dans l’hymne précédent on le comparait à un cerf blanc.
  7. Le foyer portant le nom d’Ilâ.
  8. Voy. page 122, col. 1, note 1.