Page:Langlois - Seignobos - Introduction aux études historiques, 1899.djvu/147

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grammaticale, fondée sur les règles générales de la langue, doit être complétée par l’interprétation historique fondée sur l’examen du cas particulier.

La méthode consiste à établir le sens spécial des mots dans le document ; elle repose sur quelques principes très simples.

1o La langue change par une évolution continue. Chaque époque a sa langue propre qu’on doit traiter comme un système spécial de signes. Pour comprendre un document, on doit donc savoir la langue du temps, c’est-à-dire le sens des mots et des tournures à l’époque où le texte a été écrit. — Le sens d’un mot se détermine en réunissant les passages où il est employé : il s’en trouve presque toujours quelqu’un où le reste de la phrase ne laisse aucun doute sur le sens[1]. C’est le rôle des dictionnaires historiques tels que le Thésaurus linguæ latinæ ou les Glossaires de Du Cange ; dans ces répertoires, l’article consacré à chaque mot est un recueil des phrases où le mot se rencontre, accompagnées d’une indication d’auteur qui fixe l’époque.

Quand la langue était déjà morte pour l’auteur du document et qu’il l’a apprise dans des écrits, — ce qui est le cas des textes latins du bas moyen âge, — il faut prendre garde que les mots peuvent être pris dans un sens arbitraire et n’avoir été choisis que pour faire une élégance : par exemple consul (comte), capite census (censitaire), agellus (grand domaine).

2o L’usage de la langue peut différer d’une région à une autre ; on doit donc connaître la langue du pays

  1. On trouvera des modèles pratiques de ce procédé dans Deloche, la Trustis et l’antrustion royal, Paris, 1873, in-8, et surtout dans Fustel de Coulanges. Voir en particulier l’étude sur les mots marca (Recherches sur quelques problèmes d’histoire, p. 322-356), — mallus (ib., 372-402), — alleu (l’Alleu et le domaine rural, p. 149-170), — portio (ib., p. 239-252).