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Page:Langlois - Seignobos - Introduction aux études historiques, 1899.djvu/158

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que la provenance en est certaine, non que le contenu en est exact. Mais l’authenticité produit une impression de respect qui dispose à accepter le contenu sans discussion. Douter des affirmations d’un document authentique semblerait présomptueux, ou du moins on se croit obligé d’attendre des preuves écrasantes avant de « s’inscrire en faux » contre le témoignage de l’auteur : les historiens eux-mêmes emploient cette expression malencontreusement empruntée à la langue judiciaire.

II. À ces instincts naturels il faut résister méthodiquement. Un document (à plus forte raison l’œuvre d’un auteur) ne forme pas un bloc ; il se compose d’un très grand nombre d’affirmations indépendantes, dont chacune peut être mensongère ou fausse tandis que les autres sont sincères ou exactes (et inversement), puisque chacune est le produit d’une opération qui peut avoir été incorrecte tandis que les autres étaient correctes. Il ne suffit donc pas d’examiner en bloc tout un document, il faut examiner séparément chacune des affirmations qu’il contient ; la critique ne peut se faire que par une analyse.

Ainsi la critique interne aboutit à deux règles générales :

1o Une vérité scientifique ne s’établit pas par témoignage. Pour affirmer une proposition il faut des raisons spéciales de la croire vraie. Il se peut que l’affirmation d’un auteur soit, dans certains cas, une raison suffisante ; mais on ne le sait pas d’avance. La règle sera donc d’examiner toute affirmation pour s’assurer si elle est de nature à constituer une raison suffisante de croire.

2o La critique d’un document ne peut pas se faire en bloc. La règle sera d’analyser le document en ses éléments, pour dégager toutes les affirmations indépen-