Page:Langlois - Seignobos - Introduction aux études historiques, 1899.djvu/188

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est chargée de localiser ces faits, en déterminant l’époque, le pays, l’auteur de chaque conception. — La durée, l’étendue géographique, l’origine, la filiation des conceptions sont l’affaire de la synthèse historique. La critique interne n’a pas de place ici ; le fait se tire directement du document.

On peut avancer encore d’un pas. Les conceptions par elles-mêmes ne sont que des faits psychologiques ; mais l’imagination ne crée pas ses objets, elle en prend les éléments dans la réalité. Les descriptions de faits imaginaires sont construites avec les faits extérieurs que l’auteur a vus autour de lui. On peut chercher à dégager ces matériaux de connaissance. Pour les périodes et les espèces de faits sur lesquelles les documents sont rares, pour l’antiquité, pour les usages de la vie privée, on a tenté d’utiliser les œuvres littéraires, poèmes épiques, romans, pièces de théâtre[1]. Le procédé n’est pas illégitime, mais à condition de le limiter par plusieurs restrictions qu’on est très porté à oublier.

1o Il ne s’applique pas aux faits sociaux intérieurs, à la morale, à l’idéal artistique ; la conception morale ou esthétique d’un document exprime tout au plus l’idéal personnel de l’auteur ; on n’a pas le droit d’en conclure la morale ou le goût esthétique de son temps. Il faut au moins attendre d’avoir comparé différents auteurs du même temps.

2o La description même de faits matériels peut être une combinaison personnelle de l’auteur créée dans

  1. La Grèce primitive a été étudiée dans les poèmes homériques. — La vie privée au moyen âge a été reconstituée surtout d’après les chansons de gestes (voir Ch.-V. Langlois, les Travaux sur l’histoire de la société française au moyen âge d’après les sources littéraires, dans la Revue historique, mars-avril 1897).