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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/46

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BOILEAU.

lettres, et qui personnellement étaient liés avec le poète, s’entremirent, et la paix fut faite. Vint la malheureuse satire sur l’Équivoque : les ennemis de la Compagnie firent à cette pièce un tel succès, que l’auteur n’osa l’imprimer. Pour comble, on lui attribua un méchant libelle, Boileau aux prises avec les jésuites, et le père Tellier, qui avait succédé au doux père La Chaise, fit demander au poète un désaveu public des attaques qu’on lui attribuait contre la Société. Boileau, retrouvant sa malice des bons jours, écrivit au père Tellier un billet de désaveu si méprisant et si fin, que le père Tellier ne dut pas avoir envie de s’en faire honneur. Mais aussi ne désarma-t-il pas, et il fit défendre à Boileau par le roi d’imprimer la satire sur l’Équivoque : il fit en sorte que Louis XIV exigea qu’on lui remît l’original de la pièce entre les mains.

Malgré toutes ces souffrances et ces tracas, les dernières années de Boileau furent moins moroses qu’on ne le dit communément. Ses lettres à Brossette nous le montrent gardant jusqu’au bout une assez grande égalité d’âme. Il n’est ni quinteux ni pleureur. Il est même un peu trop philosophe sur les malheurs publics, dans la triste année 1709 : il laisse là bien vite « la joie et la misère publiques » qui sont l’affaire du roi, pour venir à ce qui l’intéresse, à ses œuvres. Point n’était besoin, pour l’amadouer, des fromages et des jambons dont son futur commentateur l’accablait sans cesse. Cette curiosité et cet enthousiasme le chatouillaient agréa-