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Page:Lanson - Histoire de la littérature française, 1920.djvu/1119

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science, histoire, mémoires.

tion explicative du passé : Taine emploie l’histoire à faire la psychologie et la sociologie. Et Renan y fait tenir toute la philosophie.


3. ERNEST RENAN.


Renan[1] a le charme, la grâce, l’imagination, l’ironie, la souplesse délicieuse de l’intelligence, la richesse éblouissante des idées : peintre exquis de paysages, pénétrant analyseur d’âmes, penseur profond ; ce sont qualités et séductions que nul ne conteste à son œuvre. Mais on lui fait injustice de ne vouloir souvent voir en lui qu’un incomparable amuseur, un dilettante prestigieux, et comme le plus fort acrobate de l’esprit qui ait existé. Ceux qu’il amuse seulement, sont ceux qui ne l’ont pas compris, ou qui n’ont pas voulu s’en donner la peine : car il n’y a qu’une incurable frivolité ou un violent parti pris qui puisse s’y méprendre.

Pour bien juger ce maître irréparable, il faut se souvenir que l’œuvre de sa vie est une histoire de la religion : Histoire des origines du Christianisme, Histoire d’Israël. Cette histoire est telle, en ses deux parties, qu’elle est rigoureusement et tout entière déterminée par les solutions des problèmes philologiques. Elle ne peut être écrite que par un philologue. Libre aux spécialistes d’être sévères à la science de Renan. Un doute me reste : dans quelle

  1. Biographie : Ernest Renan (1823-1892), né à Tréguier, étudie au collège de sa ville natale, puis aux séminaires de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, d’Issy et de Saint-Sulpice. Il sortit de ce dernier en 1845. Il suivit les cours de l’École des langues orientales et du Collège de France. Il se fit recevoir agrégé de philosophie, puis docteur ès lettres. Il eut des missions en Italie (1849), en Syrie (1860). Il fut nommé professeur d’hébreu au Collège de France (1861), puis destitué : il reprit sa chaire en 1870. — Éditions : L’Avenir de la science, pensées de 1848, Calmann Lévy, 1890, in-8 ; Averroès et l’averroïsme, 1852, in-8 ; Histoire générale et système comparé des langues sémitiques, 1855, in-8 ; Études d’histoire religieuse, 1857, in-8 ; Essais de morale et de critique, 1859, in-8 ; les Origines du Christianisme, comprenant : Vie de Jésus (1863), les Apôtres (1866), Saint Paul (1869), l’Antéchrist (1873), les Évangiles (1877), l’Église chrétienne (1879), Marc Aurèle (1881) et un index général (1883) : 8 vol. in-8 ; Calmann Lévy. Histoire du peuple d’Israël, 1888-1894, 5 vol. in-8. Pendant la publication de ces deux grands ouvrages : Questions contemporaines, 1868, in-8 ; Dialogues philosophiques, 1876, in-8 ; Nouvelles Études d’histoire religieuse, 1884, in-8 ; Mélanges d’histoire et de voyages, in-8, 1878 ; Drames philosophiques (Caliban, l’Eau de Jouvence, le Prêtre de Némi, l’Abbesse de Jouarre, 1878-1886), in-8 ; Conférences d’Angleterre, in-18, 1880 ; Souvenirs d’Enfance et de Jeunesse, in-8, 1883 ; Feuilles détachées, in-8, 1892 ; Discours et Conférences, in-8, 1887, etc. — À consulter : J. Darmesteter, Ernest Renan, Revue Bleue, 14 et 21 oct. 1893. E. Ledrain, Renan, sa vie et son œuvre, 1892, in-8. S. Reinach, E. Renan (Revue archéologique), 1893. L’abbé d’Hulst, E. Renan, Paris, 1894, 4° éd. G. Séailles, E. Renan, Essai de biographie psychologique, 1895, in-12. E. Faguet, Politiques et Moralistes, 3e série.