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science, histoire, mémoires.

nelles ! C’est un des meilleurs moralistes que nous ayons eus en ce siècle.

Pour les récits de voyages, qui se rattachent tantôt aux Lettres et plus souvent aux Mémoires, les meilleurs sont des œuvres d’art, comme les deux livres de Fromentin sur l’Algérie, ou le Voyage aux Pyrénées de Taine, ou ces exquises Sensations d’Italie qu’a données M. Bourget. À côté de ces œuvres consciemment composées pour un effet esthétique, se rencontrent de vrais journaux écrits au jour le jour, au hasard des rencontres : comme ces notes posthumes de Michelet qu’on a récemment publiées.

Tous ces ouvrages sont accueillis avec empressement, et il faut qu’ils soient bien médiocres pour n’obtenir aucun succès. Il semble que le public soit las de fictions et savoure la certitude de la réalité des récits et descriptions que ces sortes d’écrits lui offrent. Il semble aussi que son éducation esthétique soit au point qu’il est apte à extraire lui-même d’une matière brute les possibilités de plaisir littéraire qu’elle contient, et qu’il se plaise à faire ce travail plutôt qu’à le recevoir tout fait d’un artiste habile. Il cueille la psychologie et le pittoresque épars dans toutes ces écritures, et si peu qu’il en récolte, son effort, autant que son gain, le contente. Enfin, il est vrai aussi que la frivolité d’esprit, l’inaptitude à penser, trouvent leur compte à ces lectures qui ne présentent que des choses particulières.