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Page:Laperche - Eve victorieuse.djvu/18

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fatigue d’une personne qui aurait regardé trop longtemps une surface brillante. J’ai besoin de voir des choses vieilles, douces, laides même, de sortir de cette ronde effrénée que nous menons, pour respirer un peu… Oh ! je suis lasse, lasse à pleurer… L’Europe nous fera du bien, à tous les deux, car vous aussi vous êtes surmené.

— Moi ? pas du tout ! — protesta M. Ronald, — je ne me suis jamais mieux porté.

Puis, arrêtant le balancement de son fauteuil :

— Hélène, — dit-il d’un air embarrassé, presque timide, — il faut que vous me rendiez ma parole. Il m’est absolument impossible de quitter l’Amérique avant quelques mois.

La surprise fit tomber des doigts de la jeune femme la grosse perle qu’elle était sur le point d’attacher à son oreille.

— Quoi ? s’écria-t-elle avec une flambée de colère dans les yeux, — vous voulez que, maintenant, je renonce à mon voyage en Europe ?

— Non, ma chérie, je ne suis pas aussi égoïste que cela. La preuve, c’est qu’en sortant du congrès, je suis allé retenir votre cabine pour le 8 avril, à bord de la Tour aine.

— Oh ! Henri, y pensez-vous ? Nous ne nous sommes jamais séparés depuis neuf ans que nous sommes mariés ! fit la jeune femme avec un joli regard tendre.

— Ce sera dur pour moi qui resterai, mais qu’y faire ? Il y a longtemps que mon préparateur n’a eu de congé. Si je ne le mets pas tout de suite au vert, il va tomber malade. En outre, je suis sur la voie d’une importante découverte, je ne puis interrompre mes travaux… Il y a encore le mariage de Dora. Elle n’a plus de père et je