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Page:Laperche - Ile inconnue.djvu/120

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104 L'ILE INCONNUE.

une personne qui fait et donne de bonnes choses les attire irrésistiblement. Ils finissent par préférer la société des domestiques à toute autre. Ils entendent constamment des conversations qui ne sont pas faites pour leurs oreilles. Des mots étranges tombent dans leurs cerveaux, y jettent une angoissante confusion. Ils en cherchent la signification, de là l'expression tendue de leurs physionomies. On ne met pas plus en forme leur caractère que leurs manières. On ne les plie à aucune règle. Ils ne savent jamais à qui ils doivent obéir. On ne leur enseigne pas le respect de l'autorité. On néglige surtout cet entraînement de la volonté qui donne l'empire sur soi et sur les autres. Cette éducation fantaisiste conduit au manque de méthode, de correction et cause la ruine des natures faibles, — les natures fortes peuvent seules réagir. Cela donne peut-être une sorte de sélection morale.

La majorité des mères, je me hâte de le dire, s'efforce bien de suppléer à l'insuffisance des éleveuses. Elles assistent au coucher et au lever de leurs bébés, surveillent leur nourriture, tâchent de faire mettre en pratique le peu d'hygiène infantile qu'elles connaissent. Une lutte sourde s'engage entre elles et les nourrices, entre la routine et le progrès, — et ce n'est pas le progrès qui l'emporte. L'enfant se trouve donc livré à des mains inexpérimentées ou ignorantes. Il est gavé sans pitié, habillé de vêtements trop lourds qui ralentissent ses mouvements et empêchent le développement de ses muscles. On ne lui donne ni assez d'air, ni assez de lumière, ni assez d'eau. Nulle part, peut-être, la plante humaine n'est