La plupart de nos jugements étant fondés sur la probabilité des témoignages, il est bien important de la soumettre au calcul. La chose, il est vrai, devient souvent impossible, par la difficulté d’apprécier la véracité des témoins, et par le grand nombre de circonstances dont les faits qu’ils attestent sont accompagnés. Mais on peut, dans plusieurs cas, résoudre des problèmes qui ont beaucoup d’analogie avec les questions qu’on se propose, et dont les solutions peuvent être regardées comme des approximations propres à nous guider et à nous garantir des erreurs et des dangers auxquels de mauvais raisonnements nous exposent. Une approximation de ce genre, lorsqu’elle est bien conduite, est toujours préférable aux raisonnements les plus spécieux. Essayons donc de donner quelques règles générales pour y parvenir.
On a extrait un seul numéro d’une urne qui en renferme mille. Un témoin de ce tirage annonce que le no 79 est sorti ; on demande la probabilité de cette sortie. Supposons que l’expérience ait fait connaître que ce témoin trompe une fois sur dix, en sorte que la probabilité de son témoignage soit . Ici, l’événement observé est le témoin attestant que le no 79 est sorti. Cet événement peut résulter des deux hypothèses suivantes, savoir que le témoin énonce la vérité, ou qu’il trompe. Suivant le principe que nous avons exposé sur la probabilité des causes, tirée des événements observés, il faut d’abord déterminer a priori la probabilité de l’événement dans chaque hypothèse. Dans la première, la probabilité que le témoin annoncera le no 79 est la probabilité même de la sortie de ce numéro, c’est-à-dire . Il faut la multiplier par la probabilité de la véracité du témoin ; on aura donc pour la probabilité de l’événement observé dans cette hypothèse. Si le témoin trompe, le no 79 n’est pas sorti, et la probabilité de ce cas est . Mais, pour annoncer la sortie de ce numéro, le témoin doit le choisir parmi les 999 numéros non sortis, et, comme il est sup-