Page:Laplace - Exposition du système du monde, 2e ed, 1798.djvu/294

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

fois plus grande que la moyenne densité de la terre, pour exercer à sa surface, une attraction égale à la pesanteur terrestre ; or les forces attractives des corps surpassent considérablement cette pesanteur, puisqu’elles infléchissent visiblement la lumière dont la direction n’est point changée sensiblement par l’attraction de la terre ; la densité de ces molécules surpasseroit donc incomparablement celle des corps, si leurs affinités dépendoient de la loi de la pesanteur universelle. Le rapport des intervalles qui séparent ces molécules, à leurs dimensions respectives, seroit du même ordre, que relativement aux étoiles qui forment une nébuleuse que l’on pourroit, sous ce point de vue, considérer comme un grand corps lumineux. Au reste, rien n’empêche d’adopter cette manière d’envisager tous les corps : plusieurs phénomènes, et entr’autres, l’extrême facilité avec laquelle la lumière traverse dans tous les sens, les corps diaphanes, lui sont favorables. Les affinités dépendroient alors de la forme des molécules intégrantes, et l’on pourroit, par la variété de ces formes, expliquer toutes les variétés des forces attractives, et ramener ainsi à une seule loi générale, tous les phénomènes de la physique et de l’astronomie. Mais l’impossibilité de connoître les figures des molécules, rend ces recherches inutiles à l'avancement des sciences. Quelques géomètres, pour rendre raison des affinités, ont ajouté à la loi de l’attraction réciproque au quarré des distances, de nouveaux termes qui ne sont sensibles qu’à des distances très-petites ; mais ces termes sont l’expression d’autant de forces différentes ; en se compliquant d’ailleurs, avec la figure des molécules, ils ne font que compliquer l’explication des phénomènes. Au milieu de ces incertitudes, le parti le plus sage est de s’attacher à déterminer par de nombreuses expériences, les loix des affinités ; et pour y parvenir, le moyen qui paroît le plus simple, est de comparer ces forces, à la force répulsive de la chaleur, que l’on peut comparer elle-même à la pesanteur. Quelques expériences déjà faites par ce moyen, donnent lieu d’espérer qu’un jour, ces loix seront parfaitement connues : alors, en y appliquant le calcul, on pourra élever la physique des corps terrestres, au degré de perfection, que la découverte de la pesanteur universelle a donné à la physique céleste.